Dénervation rénale

innervation-renaleDénervation rénale : nouveau traitement de l’hypertension artérielle

Il existe un nouveau traitement non médicamenteux, dit  interventionnel,  appelé « dénervation rénale ». Il consiste à appliquer une énergie thermique utilisant un  courant électrique de faible intensité par ondes radiofréquence ou par ultrasons sur les nerfs à destinée des 2 reins et qui cheminent le long des artères rénales.  Il est évalué dans notre unité d’hypertension artérielle, experte mondialement reconnue de cette technique.

Info Patients

Qu’est ce que la dénervation rénale ?

Le traitement consiste à interrompre sélectivement l’activité électrique des nerfs du système nerveux sympathique à destinée rénale par application locale contre la paroi des artères rénales soit d’un courant électrique de faible intensité par ondes de radiofréquence soit d’ultrasons focalisés délivré par un cathéter. Cette action sur l’activité nerveuse rénale peut diminuer la pression artérielle. La procédure est réalisée sous anesthésie générale ou locale et débute par l’insertion d’un cathéter (tube fin) de faible diamètre dans l’artère fémorale au niveau de l’aine. Cette première partie de la procédure est identique à celle réalisée lors d’une artériographie pour visualiser les artères rénales. Une fois le cathéter en place et sous contrôle radiologique, la sonde de radiofréquence ou à ultrasons est insérée par la même voie dans l’une puis l’autre artère rénale.  Une fois la sonde en place, le traitement par est appliqué plusieurs fois dans chaque artère. Au bout de 40 minutes environ l’ensemble du matériel est retiré et un pansement est mis en place au niveau de l’aine. Après un repos en position allongée pendant 24 heures, le lever est autorisé dès le lendemain de la procédure et le retour à domicile peut avoir lieu après 48 heures d’hospitalisation. Le traitement antihypertenseur médicamenteux est maintenu à la sortie puis ajusté lors du suivi par le médecin. Des consultations de suivi à intervalle régulier avec examen d’imagerie de contrôle sont organisées.

Pourquoi une recherche ?

Ce type de traitement étant récent, il est important qu’il soit utilisé dans un cadre strict afin d’étudier très précisément ses avantages et ses inconvénients.

Qui peut avoir ce traitement ?

Le traitement est proposé notamment aux patients dont l’hypertension artérielle n’est pas assez abaissée en dépit d’un traitement par un ou plusieurs médicaments antihypertenseurs. Pour y avoir accès, il faut au préalable avoir fait un bilan dans notre unité et accepté librement de participer à un protocole de recherche. Lors d’une consultation spécialisée, le médecin explique le déroulement de la recherche, répond à toutes les questions et recueille l’accord de la personne. Dans certains cas d’hypertension très sévère en échec de tout traitement médicamenteux, l’indication de dénervation rénale peut être posée en dehors de tout protocole de recherche pour des raisons compassionnelles. La décision de dénervation rénale est prise lors d’une réunion de concertation pluridisciplinaire après avoir vérifié que tous les critères pour pouvoir réaliser cette procédure sont vérifiés.

Info Professionnels

La dénervation rénale (DR) sympathique par voie endovasculaire ouvre de nouvelles perspectives thérapeutiques chez les patients ayant une hypertension artérielle résistante ou non contrôlée avec un meilleur contrôle tensionnel associé possiblement à une réduction du score thérapeutique. Chez l’homme, la DR par ablation intra-artérielle consiste à interrompre par radiofréquence ou ultrasons focalisés l’innervation sympathique afférente et efférente dans l’adventice des artères rénales. L’ablation est  réalisée consécutivement dans les deux artères rénales par soit une ou plusieurs électrodes de dispersion de courant de radiofréquence située à l’extrémité d’un cathéter spécifique, soit par une sonde à ballonnet porteuse d’un générateur d’ultrasons  introduite par voie trans-fémorale. Il existe aujourd’hui aussi types de cathéter utilisant d’autres méthodes telles que la neurolyse chimique pour réaliser une dénervation artérielle rénale.

Après les résultats de la première étude Symplicity-HTN2 (essai contrôlé, randomisé, ouvert international) à laquelle l’Unité d’Hypertension artérielle et le Service de Radiologie Interventionnelle de l’HEGP (Hôpital européen Georges Pompidou – Paris) ont participé, notre équipe a conduit un nouvel essai contrôlé randomisé, l’essai multicentrique français DENERHTN financé par le Ministère de la Santé dans le cadre du Soutien aux Technologies Innovantes et Coûteuses (STIC) en 2011, dont le promoteur était l’APHP.

Essai DENER-HTN : il a été coordonné par le Pr Azizi service d’HTA et du centre d’investigation Clinique de l’HEGP. Les résultats de l’essai français DENER-HTN qui a randomisé 106 patients ont été positifs et publiés dans la revue The Lancet en en 2015 (Pour accéder à l’article original, voir le site du Lancet)

Ainsi, la baisse moyenne de pression artérielle (PA ) systolique en mesure ambulatoire diurne après 6 mois de suivi, était de 15,8 mmHg dans le groupe « DR associée à un traitement antihypertenseur optimisé » et de 9,9 mmHg dans le groupe « contrôle ne recevant que le traitement antihypertenseur optimisé seul », soit une réduction supplémentaire d’environ 6 mmHg avec la DR avec une incidence minime de complications locales essentiellement. Le nombre de médicaments antihypertenseurs prescrits au cours des 6 mois de suivi a augmenté progressivement de façon similaire dans les 2 groupes pour atteindre une médiane de 5 médicaments au 6ème mois. Le contrôle tensionnel en mesure ambulatoire de 24 heures était obtenu chez 39,6% des patients ayant eu la DR, soit environ le double de celui obtenu chez les patients du groupe contrôle (18,9%). Enfin, on confirmait une forte variabilité de la réponse tensionnelle à la DR : certains patients étaient hyper-répondeurs et d’autres totalement non-répondeurs. L’absence de réponse pouvait être due en partie à une DR incomplète mais il n’y a aucun marqueur d’efficacité primaire de la procédure.

Les résultats de cet essai étaient discordants avec ceux de l’essai Symplicity HTN3, conduit à la demande de la FDA aux USA, qui comparait la DR à une intervention factice (New England Journal of Medicine, A controlled Trial of Renal Denervation for Resistant Hypertension). Cet essai n’a pas montré de réduction significative de la PA systolique clinique chez les patients ayant une hypertension artérielle résistante 6 mois après une DR comparée à une procédure Sham.  Notre analyse détaillée des résultats de l’essai Symplicity HTN3 a laissé entrevoir que plusieurs paramètres avaient pu contribuer à cet échec: 1) le manque de standardisation de la mesure de la PA clinique et ambulatoire, 2) les biais liés aux modifications du traitement médicamenteux non standardisé survenues de façon non contrôlée chez environ 40% des patients, 3) l’absence d’évaluation de l’observance pour un essai réalisé aux Etats Unis donnant accès au traitement médicamenteux, 4) la baisse moindre qu’attendue des valeurs de PA dans le groupe DR contrastant avec celle relativement marquée observée dans le groupe « sham », 5) la très grande hétérogénéité des procédures de DR d’un centre à l’autre. Cet essai a eu toutefois le mérite de confirmer la sécurité d’utilisation de la technique à court et moyen terme, ce qui nous a permis de poursuivre notre essai avec l’accord des autorités de santé française.

Résultats complémentaires à l’essai clinique DENERHTN*

Des résultats complémentaires à l’essai clinique DENERHTN* ont été publiés le 20 septembre 2016 dans la revue Circulation qui mettent en évidence :

  • L’indépendance des résultats encourageants obtenus pour la DR vis-à-vis de l’observance du traitement antihypertenseur médicamenteux ;
  • L’importance du phénomène de non-observance partielle ou totale au traitement médicamenteux chez les patients ayant une HTA résistante. La détection d’une non-observance partielle ou totale aux traitements antihypertenseurs devrait permettre d’établir un nouveau dialogue avec les patients pour en comprendre les raisons afin de renouveler la relation thérapeutique et les inciter de nouveau à suivre les traitements médicamenteux prescrits de manière assidue. En effet, le phénomène de non-observance est possiblement encore plus marqué en dehors d’un essai contrôlé.

Résultats complémentaires dans le cadre de l’étude Radiance-Solo

Après le pessimisme provoqué par les résultats de l’essai SYMPLICITY HTN3, les résultats de l’essai DENRHTN ont permis de relancer la recherche dans le domaine de la DR avec un optimisme raisonné et ont rouvert la voie pour de nouveaux essai thérapeutiques contrôlés utilisant de nouvelles techniques d’ablation par RF, ultrasons focalisés, ou injection de neurotoxiques selon des modalités bien définies découlant en grande partie de la méthodologie de l’essai DENER-HTN.

Notre équipe a coordonné un nouvel essai randomisé contrôlé comparant la DR à une intervention « sham ». Il a inclut non seulement des patients ayant une HTAR (Radiance-TRIO) mais aussi des patients ayant une HTA moins sévère de grade I-II et non traitée par un médicament antihypertenseur ou dont le traitement a été interrompu (Radiance SOLO).

En 2018 ont été publié dans la revue The Lancet les résultats de la DR chez des patients ne recevant aucun médicament antihypertenseur. Ils apportent, pour la première fois, que ce traitement par DR permet un bénéfice tensionnel pour de tels patients.

Au total, 146 patients ayant une HTA modérée ne prenant aucun médicament antihypertenseur ont été répartis par tirage sort entre le groupe traité par DR ou le groupe « sham ». Après 2 mois de suivi sans addition de traitement antihypertenseur sauf en cas de nécessité de sécurité, les résultats de l’étude RADIANCE SOLO montrent que :

  • la PA systolique ambulatoire diurne a été réduite de façon significativement plus importante dans le groupe dénervation (-8,5 mmHg) que dans le groupe sham (-2,2 mmHg), soit une différence de 6,3 mmHg en faveur de la DR.
  • 20% des patients traités par DR avaient leur PA normalisée sans prendre aucun médicament antihypertenseur contre 3% dans le groupe témoin.
  • Aucun évènement indésirable grave n’a été observé.

(Pour accéder à l’article original, voir le site du Lancet)

Nous avons publié les résultats à 6 mois de l’essai Radiance SOLO qui confirment la persistante de l’effet tensionnel à 6 mois avec une réduction de la charge médicamenteuse (Pour accéder à l’article original, voir le site de la revue Circulation)

Ces résultats sont concordants avec les résultats de 2 essais randomisés pilotes évaluant une sonde de DR par RF chez des patients hypertendus recevant (SPYRAL-ON MED) ou non (SPYRAL-OFF MED) et ont permis de clore le débat sur la réalité de la baisse tensionnelle obtenue après DR. Ils ouvrent ainsi de nouvelles perspectives de traitement dans cette pathologie qui touche 30% de la population française en permettant d’envisager dans le futur une alternative au traitement médicamenteux pour certains patients.

Le 16 mai 2021, les résultats de Radiance-HTN-Trio ont été publié dans la revue The Lancet. Pour cette étude, 136 patients, dont 80% d’hommes avec un âge moyen 52 ans, ayant une HTA résistante à une combinaison de trois médicaments antihypertenseurs administrés en un seul comprimé, ont été répartis par tirage au sort dans deux groupes : l’un traité par dénervation rénale par ultrasons et l’autre par intervention « factice » (« sham » en anglais) consistant en une artériographie diagnostique. Ni les patients, ni l’équipe médicale assurant le suivi ne connaissaient le groupe auquel les patients avaient été assignés par le tirage au sort. Les résultats ont montré que la dénervation rénale réduisait la pression artérielle chez des patients ayant une HTA résistante à une trithérapie antihypertensive conduite selon les recommandations actuelles. Après deux mois de suivi sans modification du traitement antihypertenseur sauf pour impératif de sécurité, les résultats de l’étude montrent que:

–        la pression systolique ambulatoire diurne a été réduite de 8 mmHg dans le groupe dénervation alors qu’elle n’a été réduite que de 3 mmHg dans le groupe « sham », soit une différence cliniquement pertinente de 4,5 mmHg en faveur de la dénervation rénale.

–        67% des patients traités par dénervation rénale ont eu une réduction ≥ 5 mmHg contre 42% dans le groupe « sham ».

–        38% des patients non contrôlés par le traitement antihypertenseur à la randomisation ont eu leur pression artérielle normalisée deux mois après la dénervation rénale tout en conservant le même traitement médicamenteux.

–        Il n’y a eu qu’une seule complication réversible (pseudoanévrisme) au niveau de la ponction sur l’artère fémorale. 

Le programme de recherche RADIANCE-HTN se poursuit actuellement par un essai pivot (RADIANCE II, voir pour les détails) et dans un futur proche dans l’hypertension artérielle systolique isolée.

Pour en savoir plus, deux revue générales ont été publiées en 2020 en collaboration avec des équipes internationales dans Nature Review Cardiology et European Heart Journal.

Vidéos

En salle de Cathétérisme : voir la vidéo

 

 

 

 

Interviews et communiqués de presse sur la dénervation rénale

Communiqué de presse AP HP du 27/03/2023

https://www.aphp.fr/contenu/hypertension-arterielle-deux-etudes-internationales-demontrent-le-benefice-tensionnel-de-la

 

Communiqué de presse AP HP du 17/05/2021

Communiqué de presse  :Inserm 21/06/2018 :
https://presse.inserm.fr/hypertension-arterielle-une-etude-internationale-demontre-le-benefice-tensionnel-de-la-denervation-renale-endovasculaire-par-ultrasons-focalises-chez-des-patients-ne-recevant-aucun-medicament-antihyp/31803/

Communiqué de presse Université Paris-Descartes 21/06/2018 :
https://presse.inserm.fr/hypertension-arterielle-une-etude-internationale-demontre-le-benefice-tensionnel-de-la-denervation-renale-endovasculaire-par-ultrasons-focalises-chez-des-patients-ne-recevant-aucun-medicament-antihyp/31803/

Article publié dans Le généraliste le 23/06/2018

Interview du Pr Michel Azizi, sur la chaine YouTube CardioOnline :https://www.youtube.com/watch?v=mI5OsHcNkiU

[hr]

Information rédigée par les médecins de l’unité d’hypertension artérielle de l’hôpital européen Georges Pompidou. 75015 Paris. Actualisation mars 202330